Macro et Focus-stacking

La macro-photographie est un monde à part qui offre des résultats suprenants. Cependant elle apporte également son lot de défis techniques. Une scène parfaitement nette nécessite l’usage de techniques particulières. C’est le sujet de cette vidéo et de cette publication.

Il s’agit de la deuxième vidéo de la chaîne SlashBienSur et nous parlons aujourd’hui de macro-photographie. La vidéo présente rapidement les techniques que j’ai utilisées pour produire une photo d’une simple ampoule. Le sujet est simple mais la réalisation du cliché l’est en revanche un peu moins. C’est pourquoi je prends le temps de vous donner un peu plus de détail dans cette publication. Si vous n’avez pas visionné la vidéo je vous invite à le faire puis continuez avec la lecture de cet article.

Note: désolé mais il y a n’y a pas d’image d’illustration pour cet article car je considère la vidéo suffisante 🙂

Idée et composition

Light bulb
Une photo d’une « simple » ampoule.

Avant de discuter technique je pense qu’il est important de rappeler que rien n’est plus important qu’un bon sujet. La technique et le matériel ne sont là que pour fournir un résultat de qualité mais cela ne sert à rien de passer des heures à retoucher une image si celle-ci n’a pas d’intérêt.

Lorsqu’on pense macro on imagine souvent des photos de fleurs ou d’insectes. En ce qui me concerne je suis d’avantage attiré par les images abstraites qu’il est possible de créer en photographiant tout et n’importe quoi. Le moindre objet anodin du quotidien, une fois bien éclairé et photographié suffisamment proche, peut devenir magnifique. Cette ampoule en est un parfait exemple.

En ce qui concerne la composition il n’y a rien de particulier à signaler. Il y a différentes règles que vous pouvez suivre pour « bien » composer une image mais ce n’est pas le sujet de cet article. Un point cependant que je trouve intéressant c’est le fait que j’ai utilisé deux ampoules intelligentes pour créer un arrière-plan plus contrasté.

J’ai en effet dans mon salon deux ampoules intelligentes LED de couleurs que je peux contrôler avec mon téléphone. En plaçant mon sujet à environ 1m de ces lampes j’ai pû contrôler avec précision la couleur de l’arrière-plan. Ainsi à gauche du tube de l’ampoule vous constaterez que l’image est principalement jaune alors qu’à droite l’arrière-plan prend une teinte orangée. J’ai d’ailleurs essayé différentes combinaisons (vert, bleu, mauve, etc). C’est donc une astuce que je vous conseille d’essayer si vous avez de telles ampoules chez vous.

Le matériel

L’objectif

On dit souvent que le matériel ne compte pas et c’est vrai. Cependant le matériel aide. Dans le cas de cette photo un objectif classique ne m’aurait pas permis de m’approcher autant de l’ampoule et le résultat aurait été très différent.

En effet j’ai utilisé un objectif macro: le XF 80mm F/2.8 R LM OI WR Macro de Fuji. La particularité des objectifs « macro » c’est qu’ils permettent de faire la mise au point tout en étant très proche du sujet ce qui est évidemment très pratique pour photographier des objets très petits comme des insectes par exemple.

Une autre particularité de ces objectifs est qu’ils offrent une grande netteté même lorsqu’on se trouve très proche du sujet. La plupart du temps ce sont des objectifs de grande qualité qui ont du même coup un prix assez élevé.

Le XF 80mm répond aux critères mentionnés. Il s’agit d’un objectif macro qui offre un ratio d’agrandissement de 1:1. Cela signifie qu’à la distance minimale de mise au point, un objet de 1cm de haut représente 1cm de haut sur le capteur de votre appareil photo. Habituellement on réserve l’appelation « macro » aux objectifs qui offrent au minimum un ratio de 1:1 bien que certains constructeurs ne respectent pas toujours cette règle.

En plus de ce ratio d’agrandissement cet objectif est considéré comme celui offrant la meilleure netteté chez Fuji. C’est donc un choix parfait pour de la macro.

L’appareil

Comme mentionné dans la vidéo j’ai utilisé mon Fuji X-T3 pour réaliser cette photo. Vous n’avez pas besoin d’un type d’appareil en particulier pour faire de la macro mais certaines fonctionnalités peuvent s’avérer très utiles comme on le verra par la suite. Cependant il vous est tout à fait possible de réaliser ce type de photo avec à peu près n’importe quel appareil à objectif interchangeable. En effet c’est avant tout l’objectif qui est important dans cette situation.

Alors évidemment une meilleure résolution offre une meilleure qualité d’image. Mon X-T3 avec ses 26Mpx offre une résolution que je qualifierais de standard en 2019. Il existe des boîtiers (notamment plein format) qui ont des résolutions bien plus hautes. Cependant pour vraiment pouvoir bénéficier d’une meilleure qualité il faut aussi une meilleure qualité d’objectif. Bref tout est question de besoin. Allez-vous imprimez vos photos en très grand?

Le trépied

Un autre élément important pour réaliser ce genre de photo est le trépied. L’objectif que j’utilise est stabilisé mais rien ne remplace un bon trépied dans ce genre de situations. De plus en macro les tremblements se voient beaucoup plus facilement.

Chose importante: ne pas oublier de désactiver la stabilisation de l’objectif lorsqu’on utilise un trépied. Dans le cas contraire vous risquez d’obtenir l’effet inverse et l’image ne sera pas parfaitement nette.

Ensuite il est très difficile de faire la mise au point en macro car la zone de netteté se réduit lorsqu’on se rapproche du sujet. Pour être certain d’obtenir une image nette il vaut donc mieux faire la mise au point manuellement et n’absolument plus bouger. C’est donc bien plus pratique d’être sur un trépied.

Enfin le trépied permet de garder la même composition tout en prenant le temps d’ajuster les paramètres de l’appareil.

Les paramètres

En parlant de paramètres, j’ai utilisé la sensibilité la plus basse sur mon appareil – ISO 160 – afin de ne pas introduire de bruit dans l’image.

Ensuite j’ai fermé l’objectif à f/10. C’est une petite ouverture qui me permet d’obtenir une zone de netteté assez large – nous allons voir plus tard que c’est nécessaire – tout en conservant une excellente qualité d’image.

Je vous déconseille d’aller plus haut que f/10 pour éviter tout problème de diffraction. En effet je vois parfois des articles ou vidéos qui expliquent qu’il faut choisir l’ouverture la plus petite pour obtenir la plus grande profondeur de champ. Dans ces exemples l’ouverture de f/22 est alors mentionnée. Bien que ce soit techniquement vrai, la profondeur de champ est effectivement plus grande, cela ne parle pas du fait que la qualité de votre image s’en ressent.

Si vous ne me faites pas confiance je vous invite à regarder dans la base de données de DXOMark. Vous y trouverez la résolution qu’il est possible d’obtenir en fonction de l’ouverture pour des centaines d’objectifs.

Voici un exemple pour un l’objectif Canon EF 100mm f/2.8L Macro IS USM: https://www.dxomark.com/Lenses/Canon/EF100mm-f-2.8L-Macro-IS-USM-mounted-on-Canon-EOS-5D-Mark-IV—Measurements__1106

Vous constaterez qu’il est rare de trouver un objectif pour lequel la qualité ne décroit pas au dela de f/10.

Pour ce qui est de la vitesse d’obturation j’ai simplement utilisé le paramètre qui m’offrait une bonne exposition. En effet comme j’étais sur trépied et que mon sujet était statique je n’avais pas de contrainte à ce niveau-là.

Le focus bracketing

Habituellement une ouverture de f/10 vous garantit une image nette de l’avant plan jusqu’à l’arrière-plan. En revanche en macro on se trouve si près du sujet que cela diminue considérablement la zone de netteté.

Même en essayant de faire la mise au point sur différentes zones de l’image il est impossible d’obtenir une photo nette sur l’ensemble du sujet.

Pour contourner ce problème j’ai utilisé ce qu’on appelle du focus stacking. Cela consiste à prendre une multitude de photos de la même scène en faisant la mise au point sur différents éléments.

Ensuite on assemble toutes ces photos dans un logiciel d’édition pour ne conserver que les zones nettes des différentes images pour obtenir une seule photo totalement nette.

En ce qui me concerne j’ai réalisé 200 clichés de mon ampoule. Cela peut sembler beaucoup mais c’est nécessaire pour obtenir cette qualité d’image. Lorsqu’on réalise du focus stacking pour une photo de paysage on peut souvent s’en tirer avec seulement 3 ou 4 clichés différents. Cependant ici la zone de netteté est tellement fine que cela ne suffit pas.

La première étape consiste à prendre les 200 clichés tout en changeant la mise au point entre chaque prise de vue. Pour faire cela on utilise une fonctionnalité qui s’appelle le « focus bracketing ». Tous les appareils ne disposent pas nécessairement de cette option mais c’est le cas de mon X-T3.

J’ai donc simplement fait la mise au point sur l’élément le plus proche de l’objectif, j’ai configuré le focus bracketing de mon boîtier pour prendre 200 photos en utilisant un « step » de 2 sur 10. Le step correspond à l’amplitude du mouvement de la mise au point entre chaque photo. Pour trouver le bon paramètre il faut faire des essais et vérifier si la dernière photo prise couvre bien le point le plus éloigné de l’objectif. N’oubliez pas non plus de vérifier que l’écart de mise au point (le step) couvre bien toute l’image. Un écrart trop grand vous laissera avec des zones floues. Il faut donc regarder une série d’images et vérifier que la zone de netteté se déplace bien sans laisser de trous.

Etant donné qu’il me fallait 200 photos j’ai décidé d’utiliser un format JPEG plutôt que RAW. Le JPEG m’offre moins de possibilités en post-production cependant le format étant plus léger cela m’a simplifié l’édition étant donné le volume important de clichés à traiter.

De plus Fuji est réputé pour la qualité de ses JPEG. J’ai donc choisi un profil d’image Fuji nommé Vivia qui est très saturé et qui convenait bien à ce que je souhaitais obtenir. Ce n’est vraiment pas habituel pour moi d’utiliser du JPEG à la place du format RAW mais je dois bien avouer que les résultats sur cet appareil sont excellents et cela simplifie considérablement le travail. Dans certaines situations je pense donc que c’est un vrai plus.

Le focus-stacking

Une fois les 200 photos prises et importées sur mon ordinateur il ne me restait plus qu’à les assembler. Photoshop dispose de fonctionnalités permettant de faire du focus stacking cependant je ne pense vraiment pas qu’il soit fait pour traiter autant d’images. J’ai essayé et l’étape d’alignement à elle seule n’a pas réussi à se compléter.

Je me suis donc tourné vers un logiciel spécialisé dans ce domaine. Il s’agit d’Heliconsoft. Je ne sais pas si c’est la meilleure option disponible car je n’ai testé que lui. Je ne peux donc pas comparer et j’ai simplement utilisé la version de démo qui dure 30 jours.

Cependant je n’ai eu aucun mal à importer les 200 photos dans l’outil puis à générer un rendu en à peine quelques minutes. Il a tout de même fallu que je joue avec les paramètres d’alignement. En effet entre le premier cliché et le dernier il y a un décalage assez important dû au changement de la mise au point. Le logiciel est capable de corriger cela mais par défaut la configuration n’était pas assez permissive pour permettre un alignement correct. Dans la section « Autoadjustments » j’ai donc augmenté les valeurs à 10% pour l’ajustement vertical et horizontal ainsi que pour l’agrandissement (scale). Pour être honnête j’ai testé ces valeurs au hasard et j’ai simplement vérifié le résultat jusqu’à obtenir quelque chose de parfait.

Derniers ajustements

Une fois le rendu obtenu je l’ai importé dans Lightroom et j’ai fait quelques ajustements de base. Je n’ai absolument rien changé aux couleurs mais j’ai réhaussé les hautes lumières et diminué les noirs pour obtenir une image plus contrastée.

J’ai aussi édité l’image dans Photoshop pour appliquer un flou sur certaines zones de l’arrière plan. En effet sur les clichés j’ai un magnifique arrière-plan bien flou mais avec le logiciel de focus-stacking cela a introduit quelques artefacts. Cependant cela se corrige très bien en quelques minutes dans Photoshop.

Conclusion

Voilà je pense avoir fait le tour des différentes étapes que j’ai suivies pour réaliser cette photo. J’espère que cela vous donnera des idées.

Si vous n’avez pas d’objectif macro essayez d’abord de faire des photos rapprochées avec vos objectifs et sachez aussi qu’il est possible de faire de la macro à l’aide d’adaptateurs spéciaux qui se connectent à des objectifs normaux.

Voici un exemple de l’usage de ces adaptateurs : https://www.youtube.com/watch?v=fT1fcwMu8jY

Sur ce j’espère que vous avez apprécié cette vidéo. N’hésitez pas à la commenter si vous avez des questions je me ferai un plaisir d’y répondre.

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